La lutte contre la fistule obstétricale s’intensifie en Côte d’Ivoire et dans la sous-région, avec une rencontre régionale de partage d’expériences qui s’est tenue les 22 et 23 mai 2025 à l’hôtel Silver Moon à Cocody Angré. Cette réunion stratégique a rassemblé des experts chirurgiens, des représentants des ministères de la Santé et de la Femme, des ONG, des partenaires techniques et financiers, ainsi que des spécialistes de l’UNFPA, tous unis par la même ambition : stimuler l’innovation pour prévenir, traiter et éliminer cette pathologie dévastatrice.
Des progrès notables mais des défis persistants
Mme Cécile Compaoré Zoungrana, représentante résidente de l’UNFPA en Côte d’Ivoire, a souligné les avancées significatives réalisées dans le pays. Elle a notamment mis en avant une réduction de 37 % de la mortalité maternelle entre 2012 et 2021, passant de 614 à 385 décès pour 100 000 naissances vivantes. De plus, une baisse des mariages précoces et des mutilations génitales féminines, facteurs aggravants de la fistule, a été observée. Malgré ces progrès encourageants, Mme Zoungrana a rappelé que la fistule demeure “trop présente” en Côte d’Ivoire et dans plusieurs régions d’Afrique, insistant sur la nécessité de renforcer les programmes de santé maternelle et de multiplier les centres spécialisés.
Prévention et collaboration : les clés du succès
Mme Kim Yesong, représentante adjointe de KOICA (l’agence coréenne de coopération internationale), a mis l’accent sur un changement de paradigme crucial : “passer du traitement à la prévention”. Elle a réitéré que l’éradication de la fistule est un effort collectif qui exige la collaboration de tous les partenaires.
La Ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfant, Mme Nassénéba Touré, a rappelé que cette conférence s’inscrit dans un cadre régional soutenu par la CEDEAO, qui exhorte les États membres à renforcer leurs engagements politiques et financiers pour éradiquer la fistule. Elle a révélé qu’un investissement de plus de 16 millions de dollars a été réalisé depuis 2012 grâce au partenariat avec l’UNFPA et KOICA. Ces fonds ont permis la création de neuf centres de prévention, la prise en charge de plus de 4 400 femmes et le renforcement des formations.
Cependant, la Ministre a déploré les défis majeurs qui subsistent, notamment le nombre élevé de femmes en attente de traitement en Afrique de l’Ouest et du Centre, estimé entre 600 000 et un million jusqu’en 2018. Les difficultés de réinsertion sociale des femmes opérées, souvent par manque de ressources suffisantes, constituent également une préoccupation majeure. En Côte d’Ivoire, la prévalence de la fistule est estimée à 1 % chez les femmes en âge de procréer, affectant environ 74 000 femmes.
Une feuille de route pour 2030
M. Soro Kountélé Gona, directeur de cabinet adjoint du ministre de la Santé, de l’Hygiène Publique et de la Couverture Maladie Universelle, a salué la coopération Sud-Sud entre dix pays de la sous-région. Il a exprimé l’espoir que les recommandations issues de cette rencontre serviront de feuille de route pour intensifier la lutte contre cette pathologie, qui ne doit plus être considérée comme une fatalité.
Cette dynamique s’inscrit pleinement dans la campagne nationale récemment lancée par la Côte d’Ivoire, qui vise l’élimination de la fistule obstétricale d’ici 2030. Un investissement estimé à 75 milliards de FCFA est prévu pour traiter 77 000 femmes, renforcer les initiatives de prévention et assurer leur réinsertion sociale. La Côte d’Ivoire est résolument engagée à offrir un avenir sans fistule à toutes ses femmes.
L’Africaine