Dans les coins les plus reculés comme dans les métropoles dynamiques du continent, un mécanisme pernicieux continue de maintenir les femmes africaines dans un étau économique : la violence économique basée sur le genre.
Une Définition Internationale Sans Équivoque
Selon les Nations Unies, la violence économique se définit comme suit : “Elle consiste à rendre (ou tenter de rendre) une personne financièrement dépendante en maintenant un contrôle total sur ses ressources financières, en refusant l’accès à l’argent et/ou en lui interdisant d’aller à l’école ou de travailler.”
Cette définition capture l’essence d’un mécanisme de domination qui dépasse les frontières africaines mais trouve sur le continent un terrain particulièrement fertile.
Au-delà des Coups, le Contrôle Insidieux
La violence n’est pas toujours physique. Elle se cache souvent dans des pratiques quotidiennes qui privent les femmes de leur dignité et de leur liberté économique. C’est un système où chaque décision financière, chaque opportunité professionnelle devient un terrain de lutte silencieuse.
Témoignage : L’histoire d’Ayaba 30 ans, quelque part en Afrique de l’ouest.
“Pendant 8 ans, j’ai travaillé comme vendeuse au marché. Chaque sou que je gagnais devait être remis à mon mari. Il décidait de tout : combien j’allais dépenser, si je pouvais acheter de nouveaux vêtements ou aider ma famille. Mon salaire était le sien, mon travail n’était qu’une extension de son pouvoir.”
Ayaba incarne des milliers de femmes africaines dont l’autonomie économique est systématiquement érodée, illustrant parfaitement la définition onusienne de la violence économique.
Les Visages Multiples de la Violence Économique
- Héritage et Propriété : Le Déni Systémique des Droits
La négation du droit à l’héritage représente l’une des formes les plus brutales de violence économique. Dans de nombreuses communautés africaines, les traditions successorales persistent à exclure les femmes de l’héritage foncier et immobilier (ce pourquoi les parents préfèrent avoir des enfants garçons que filles !)
Implications concrètes :
• Impossibilité de posséder des terres
• Vulnérabilité économique absolue
• Dépendance perpétuelle envers les hommes de la famille et externes
• Précarisation transgénérationnelle.
Un exemple saisissant : au Rwanda, malgré les avancées législatives, moins de 20% des femmes possèdent des titres fonciers officiels.
- Travail et Rémunération : La Précarité Institutionnalisée
L’univers professionnel africain demeure profondément inégalitaire, cantonnant les femmes dans des secteurs marginalisés et peu rémunérateurs.
Réalités du terrain :
• Surreprésentation dans l’économie informelle
• Écarts salariaux systématiques (jusqu’à 40% dans certains pays)
• Emplois précaires sans protection sociale
• Discriminations à l’embauche et à l’évolution de carrière
• Travail domestique non reconnu économiquement
Au Maroc, par exemple, les femmes consacrent en moyenne 4,6 fois plus de temps aux tâches domestiques non rémunérées que les hommes.
- Éducation et Formation : Le Premier Verrou
L’accès limité à l’éducation constitue le mécanisme initial de reproduction de la violence économique.
Obstacles structurels :
• Investissements moindres dans l’éducation des filles
• Mariages précoces interrompant la scolarité
• Stéréotypes de genre limitant les choix professionnels (métiers genrés)
• Manque d’infrastructures adaptées (sanitaires, sécuritaires)
En République Démocratique du Congo, seulement 33% des filles terminent leur cycle secondaire, contre 47% des garçons.
Un Combat pour la Dignité
Leviers de Transformation
- Réformes Législatives
o Égalité successorale
o Protection contre les discriminations professionnelles
o Reconnaissance du travail domestique - Autonomisation Économique
o Programmes de microcrédits et de financement
o Formations professionnelles ciblées
o Entrepreneuriat féminin - Déconstruction des Normes Sociales
o Campagnes de sensibilisation
o Éducation égalitaire
o Valorisation des modèles féminins
Un Appel à la Transformation
La violence économique basée sur le genre n’est pas un problème de femmes, mais un défi sociétal. Chaque pas vers l’égalité économique est un pas vers le développement de tout un continent.
“Libérer l’économie des femmes, c’est libérer l’économie de l’Afrique.”